Le 11 juin 1944, les jeunes tombés au bois de Bourlon, ont donné leur vie pour un idéal : la liberté.

Juin 1944 : Les Maquis font mouvement

 
6 juin 1944 : débarquement en Normandie 
Tous les résistants, sont sur le pied de guerre : les réseaux se rassemblent et sont prêts à intervenir. 
Il faut soutenir l’effort Allié en compromettant l’arrivée des renforts Allemands en Normandie. 
 
8 juin 1944: Sur les ondes de la BBC, un message personnel : « Le canapé est au milieu du salon ».  
Trois compagnies FTP, comprenant 350 hommes, font mouvement du bassin minier du Pas de Calais vers les Ardennes. Elles sont sous les ordres des commandants Bruno, Arthur et Tino. Leur destination finale : Revin où ils sont appelés à former un maquis destiné à se battre sur les arrières de l’ennemi. 
Les jeunes dont la plupart ont moins de 20 ans prennent la route du maquis par petits groupes. Les itinéraires sont variés pour éviter les troupes de l’occupant.  
Mais les Allemands sont informés de ces mouvements. C’est ainsi que le 9 juin, trois FTP sont arrêtés sur la route de Cambrai, ils avaient des pétards explosifs dans leurs musettes.  
Les Allemands préparent leurs interventions et de nombreux accrochages se produisent. 

  • à Fampoux (8 juin) : 30 FTP, qui font une halte dans le cimetière pour se reposer, sont faits prisonniers. Ils seront déportés le 13 juillet 1944. 
  • à Mont Saint Eloi, Ablain Saint Nazaire, Monchy Le Preux (9 juin), Guemappe, Villers-Les-Cagnicourt, Arsonville et Bernoville, Guise, Fourmies (3 morts), d’autres accrochages ont lieu. 
  • dans la nuit du 8 au 9 juin, un violent combat à lieu entre Hénin-Liétard et Drocourt. Après 4 heures de combat les rescapés se replient vers Noyelles Godault où ils seront tous arrêtés sur dénonciation. 
  • le 10 juin, 17 sont arrêtés à Vitry, Biache, Fresnes-les-Montauban. 
  • le 11 juin, 20 FTP sont arrêtés à Dury. 
  • à Bourlon : le 11 juin 1944, les troupes Allemandes encerclent les FTP. Bilan : 10 morts et 22 prisonniers. 
  • à Haplincourt : le 11 juin 1944, 7 morts sont à déplorer. 
  • à Vandencourt : le 13 juin 1944, une centaine de FTP est encerclée, de lourdes pertes sont à déplorer dans les deux camps. 
  • à Tilloy les Mofflaines : le 14 juin, deux hommes se font arrêter sur la route, ils ont des armes sur eux… Ils seront fusillés immédiatement.  
  • à Aizecout-le-Bas : le 28 juin 1944, les Allemands encerclent un baraquement où 22 jeunes FTP doivent passer la nuit. Bilan : 3 morts et plusieurs prisonniers. 

 11 juin 1944 : Bourlon 
 

  • L’affaire du maquis des Ardennes et Bourlon : dimanche 11 juin 

La 5ème compagnie issue du béthunois, la 16ème compagnie ainsi que le groupe 21A d’Annezin rejoignent le bois de Bourlon. 
De nombreux jeunes gens passent par le village, la plupart des habitants les ont aperçus… beaucoup savent qu’ils font étape dans le bois… 
C’est ainsi qu’un témoin dira : « Ce dimanche là, ils devaient partir…. ».

Le plan des Allemands était bien préparé :Ils devaient encercler le bois. 

  • Arrivée des camions par la route d’Anneux, par la rue de Sains et par la rue de la Gare : les trois routes menant au village sont sous contrôle. 
  • Depuis la route d’Anneux (château d’eau), des Allemands descendent dans le marais et prennent position dans le bois en contournant le mémorial canadien. 
  • D’autres arrivent sur la place et les Allemands remontent les rues « recroquevillés… comme en temps de guerre » 
  • Un autre camion arrive à l’Abbaye et demande à un Bourlonnais « le château ? ». Celui-ci se doutant du pourquoi de leur venue répond : « le château c’est pas ici. C’est sur la place ». Le camion fait demi-tour… et la boucle ne fut pas bouclée ! 

 
Le début de l’attaque : Mort d’un capitaine allemand 
En remontant les rues vers le bois, les Allemands et les maquisards se trouvent nez à nez. 
Des cris fusent, entendus par des habitants de Bourlon. 
« Qu’est ce qu’on fait ? On le fait prisonnier ? Non, on peut pas ? On le tue ! » 
Notre témoin dira :  
« Après bien sur, ils se sont sauvés les maquisards, et les Allemands, ils ont ramassé leur chef qui a été tué… Ils l’avaient mis dans une civière, tout ça. Ils lui avaient rendu les honneurs… en pleine bagarre !!... Hein ! Ils ont rendu les honneurs à l’officier qui était mort. » 
 
La fuite des maquisards
La boucle n’étant pas bouclée les maquisards eurent une porte de sortie. 
Certains fuirent à travers champs par le chemin de Cambrai, d’autres traversèrent le bois en direction de Fontaine-Notre-Dame… 
D’autres se réfugièrent dans le village et furent cachés par des habitants. 
 
Le soir même et le lendemain matin
Le soir même, les Allemands sont allés chercher le maire, Henri DARTOIS : il fallait ramasser les cadavres. 
Le maire n’ayant pas de véhicule, ils ont réquisitionné la voiture du garagiste puis sont partis à la recherche des cadavres. Notre témoin dira : « …Ils avaient été tués par-ci par-là et il fallait les retrouver. Ils étaient ensuite empilés dans la voiture… » 
Le lendemain, le jour venu, les recherches reprennent. Cette fois, les cadavres sont empilés dans un tombereau. 
 
Les corps furent d’abord emmenés à la mairie, Sur 8 d’entre eux, on trouva des papiers qui furent déposés à la Mairie. Pour les deux autres, une description précise des vêtements qu’ils portaient. 
Les corps furent ensuite transférés à la salle communale. 
Le curé a béni les corps. Puis les a accompagnés jusqu’au cimetière malgré l’interdiction des Allemands. Selon leurs ordres, il n’y eut pas d’office religieux. 
Ils furent enterrés dans le cimetière communal dans la plus grande discrétion. 
 
(Actuellement, dans le cimetière communal de Bourlon, on ne trouve plus que la tombe des deux inconnus. Les familles des huit autres résistants ayant récupéré les corps des leurs après la fin de la guerre.) 
 

  • BILAN de l’attaque: 

Du cotés des Maquisards :  
        10 maquisards furent tués dans le bois de Bourlon 
        22 furent faits prisonniers et 20 d’entre eux, condamnés à mort par le tribunal militaire d’Arras seront fusillés le 18 juin à Arras. Les deux autres seront déportés. 
 
Du coté Allemand 
        1 officier fut tué dès le début de la bataille 
        22 Allemands furent tués 
 
Le lendemain :  
Le bois est entièrement cerné. Il est ratissé par les Allemands ainsi que le village et ses abords. 
Des témoins diront :  
« …Lorsque nous sommes partis travailler à Cambrai… Nous partions à vélo par la route d’Anneux… Nous avons vu des soldats partout, ils avaient complètement cerné le bois…Nous ne nous sommes pas attardés, nous avons passé notre chemin… » 

  • Dans le village : Le Café de la jeunesse : prisonniers dès la fin de la bagarre 

Les jeunes étaient sur le pied de guerre depuis le débarquement, beaucoup attendaient les instructions.  
Ce jour-là, une vingtaine de personnes attendait au café, jouant aux cartes. 
Ils virent les Allemands passer et remonter les rues. 
Ils entendirent les coups de feu et tout le monde se coucha dans le café. 
Après la bagarre ils essayèrent de sortir deux par deux mais furent repoussés jusqu’au café. 
Aux environs de 20h 30 un officier Allemand entra, accompagné par un soldat. Un témoin dira : «il est rentré un soldat. Il a retiré sa mitraillette qu’il avait à l’épaule. Il a enlevé le chargeur puis il a mis un nouveau chargeur. Alors là, j’ai dit ça y est… »  
On leur demanda leurs papiers et ils restèrent là, ils attendaient, gardés par le soldat Allemand et sa mitraillette. 
 
Plus tard dans la nuit, un des hommes présent osa s’adresser au chef et lui dit : « Ich arbeit Epinoy… » 
Dans un premier temps l’officier n’y fit pas attention puis le même homme renouvela l’opération « Ich arbeit Epinoy » 
Là, l’officier lui demanda son laissez-passer… puis finalement : « Retour maison » 
Beaucoup d’autres travaillant aussi à Epinoy : « Ich arbeit Epinoy… Ich arbeit Epinoy… » 
Finalement tous furent relâchés vers minuit 
 
La patrouille… puis de nouveau prisonniers : cette fois à l’école 
Les jeunes, relâchés du café, tentèrent donc de rentrer chez eux. Ils descendirent la rue de la Sablonnière mais, chemin faisant, ils rencontrèrent une patrouille et furent de nouveau arrêtés puis conduits à l’école à coups de pieds, de crosses, … 
L’un d’entre eux dira :  
« Des portes de l’école - des grandes portes !!! - jusqu’à la salle j’ai pas touché terre » 
Ils se retrouvèrent donc enfermés dans une salle de classe de l’école. Mais ils n’étaient pas en contact avec les maquisards faits prisonniers lors de la soirée (Ceux-ci étaient enfermés dans la cave de l’école). 
Là, de nouveau, l’attente et l’angoisse… 
Finalement, l’officier qui les avait relâché du Café de la Jeunesse entra. Il les reconnut et leur demanda ce qu’ils faisaient encore là. Tous furent mis dehors : RAOUST ! RAOUST ! 
Il y aurait aussi eu intervention d’un ingénieur travaillant à l’usine de Bourlon (Fricasse) à qui on aurait demandé s’il reconnaissait quelqu’un. Il aurait alors attesté qu’il n’y avait parmi les résistants aucun jeune de Bourlon. La population ne pouvait donc pas être tenue pour responsable. Suite à cette intervention, les jeunes enfermés dans la salle de classe auraient été relâchés. 

Le Devoir de Mémoire 

Le 11 juin 1944, les jeunes tombés au bois de Bourlon, ont donné leur vie pour un idéal : la liberté. 
CASSOTANA André Charles : Ouvrier d’usine, allait fêter ses 19 ans. (19/06/25 – 11/06/44). 
CAUDRON Florent Alfred : Ingénieur I.D.N., allait avoir 25 ans. (22/07/19 – 11/06/44). 
CRAMMER Robert André : N’avait pas encore 19 ans. (13/10/25 – 11/06/44). 
FRANCOIS René : Venait d’avoir 24 ans. (05/06/20 – 11/06/44). 
LEROY Edouard Alexandre : Houilleur, allait avoir 37 ans. (08/11/07 – 11/06/44). 
VASSEUR Camille Félicien : Allait avoir 30 ans. (22/07/14 – 11/06/44). 
VASSEUR François : Soudeur, avait 34 ans. (18/02/10 – 11/06/44). 
VASSEUR Paul : Ajusteur, n’avait pas encore 21 ans. (22/12/23 – 11/06/44). 
DEUX INCONNUS : Agés approximativement de 24 et 25 ans 
 
Bourlon a tenu à ce qu’un monument perpétue le souvenir de ces jeunes. 
En décembre 1945 fut créé un comité pour « l’érection d’un monument à la mémoire des Patriotes tués à Bourlon le 11 juin 1944 ». Le comité ouvrit une souscription avec l’accord de la préfecture du Pas de Calais. 
Le terrain sur lequel devait être érigé le monument fut donné par M. De FRANCQUEVILLE. 
Juin 1949 : inauguration du monument  
 
Juin 1984 : une plaque indiquant le nom des 10 maquisards est installée sur le monument. 
 
6 juin 2010 : lors de la cérémonie annuelle : une plaque explicative destinée aux visiteurs est ajoutée.